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D’étranges similitudes entre les chasses au trésor de Forrest Fenn et de la Chouette d’Or de Max Valentin ?

Par Jacques Mandorla

Forrest Fenn, Chouette d'Or, Max Valentin   Forrest Fenn, Chouette d'Or, Max Valentin

Alors que la Chouette d’Or en est à sa 28e année sous terre, la chasse au trésor de Forrest Fenn a finalement été résolue en « seulement » 10 ans ! Rappel des faits. Forest Fenn, aventurier, ancien pilote de l’armée de l’air américaine, pilleur de sites archéologiques (il s'est fait arrêter plusieurs fois à Pompéi en train de voler des amphores !) et vendeur d'antiquités à Santa Fe au Nouveau Mexique (USA), a lancé en janvier 2010 une chasse au trésor ludique. C’était très courageux de la part alors qu’il venait, à 80 ans, de guérir difficilement d’un cancer. Fenn a édité un livre intitulé « The thrill of the chase » (Le frisson de la chasse) qui contient, selon lui, 9 indices cruciaux disséminés dans un poème de 6 quatrains. Ce livre s’est vendu à 350 000 exemplaires mais, malheureusement, 6 chercheurs ont perdu la vie pendant la traque, après avoir chuté dans un précipice ou s’être noyés dans le Rio Grande !

Le trésor à rechercher, dont Fenn a estimé la valeur à plus d'un million de dollars, se présentait sous la forme d'un petit coffre pesant 20 kilos, rempli de pièces et de pépites d'or, de statuettes précolombiennes et de nombreux bijoux (un bracelet en turquoise, une bague en or et émeraudes du XVIIe siècle...). Ce coffre était caché dans les montagnes Rocheuses… qui s’étendent sur environ 3 000 km dans l’Ouest américain !

Le vainqueur met un an avant de se faire connaître !

Le 6 juin 2020, Jack Stuef découvre le coffre dans le parc national de Yellowstone (Wyoming), à 1 340 km au nord de Santa Fe, lieu de résidence de Fenn. Il appelle alors ce dernier et va lui montrer le coffre. Fenn était très heureux que sa chasse se termine de son vivant car il craignait de disparaître avant de connaître le vainqueur (une crise cardiaque l’a finalement terrassé trois mois plus tard, à l’âge de 90 ans).

Forrest Fenn, Chouette d'Or, Max Valentin

Jack Stuef, le découvreur du coffre rempli d’objets précieux, fait examiner sa trouvaille à Forrest Fenn, le créateur de la chasse américaine.

Jack Stuef souhaitait absolument conserver son anonymat, mais a été obligé de parler en juin 2021, soit une année après la découverte du coffre ! En effet, quand Forrest Fenn a annoncé que la chasse était terminée, des milliers de messages ont été diffusés sur les réseaux sociaux dans lesquels les internautes affirmaient toutes sortes de rumeurs : le trésor n’aurait, en réalité, pas été trouvé, ou bien Forrest Fenn aurait annoncé sa découverte par erreur ou, pire encore, ce trésor n’existerait pas !

Devant ce tollé général, Jack Stuef a alors décidé de se faire connaître dans les médias et de montrer le contenu exact du coffre qu’il avait trouvé. Et il a surtout révélé comment il est parvenu à trouver la localisation exacte du coffre : comme la quasi-totalité des participants, il a d’abord cherché dans le poème des jeux de mots, des codes secrets, des coordonnées GPS, des anagrammes ou des sens cachés. Puis, ne parvenant à rien de concret, il a eu une idée de génie : il a décidé de se concentrer sur la psychologie de Forrest Fenn et de raisonner comme lui. En somme, il s’est mis mentalement dans sa tête : un peu comme le font les profileurs du FBI qui, pour comprendre puis arrêter un criminel, se mettent dans la tête de l’assassin. Pour parvenir à « cerner » Forrest Fenn, Jack Stuef a essayé de déterminer son caractère, sa psychologie, ses passions… en lisant tous les textes biographiques se rapportant à lui. C’est cela, affirme-t-il, qui lui a permis de réussir à résoudre l’énigme de la chasse !

Forrest Fenn, Chouette d'Or, Max Valentin

Photo du coffre, ouvert par Jack Stuef sur le lieu même de sa découverte dans les montagnes Rocheuses.

Ma rencontre avec Régis Hauser

Nous nous sommes rencontrés en 1989 quand, lui et moi, avions été lauréats d’un Grand Prix décerné par la revue Stratégies à des campagnes publicitaires de marketing direct. On s’est revu peu après et Régis voulait écrire un livre sur le sujet. J’ai alors rédigé un chapitre sur l’opération qui m’avait permis de gagner mon prix : une campagne d’annonces-presse magazine contenant un coupon-réponse en faveur de mon client « Le Centre d’information de l’industrie cimentière ». L’ouvrage est sorti en 1991 sous le titre « L'efficacité en marketing direct, la vente par la persuasion » aux Éditions d'Organisation. Très vite, avec Régis, on s’est découvert une passion commune pour la recherche de trésors, aussi bien dans les archives que sur le terrain, au moyen d'un détecteur de métaux.

Puis, un jour, nous évoquons l’opération lancée par Kit Williams, un peintre-écrivain anglais qui a créé en 1979 une chasse au trésor intitulée « Masquerade » et dont le livre, contenant les énigmes, s'est vendu à plus d'un million d'exemplaires ! Après trente mois de recherches, Ken Thomas, un ingénieur de 58 ans, est parvenu à trouver un lièvre d'or, incrusté de pierres précieuses, enterré à Ampthill Park, près de la ville de Bedford. Pour l'anecdote, Ken Thomas n'hésita pas quelques années plus tard à vendre le lièvre aux enchères en décembre 1988, chez Sotheby's : l'œuvre d'art fut emportée pour 31 900 livres sterling, ce qui représenterait aujourd'hui environ 36 000 euros. On apprendra bien plus tard que le découvreur du lièvre, Ken Thomas, vivait avec l’ancienne petite amie de Kit Williams ! Cette dernière a affirmé ne pas connaître les solutions de l’énigme, mais elle a fourni à son nouveau compagnon une information capitale : l’endroit où Kit Williams aimait aller se promener avec elle le week-end ! Et c’est précisément dans le cimetière de ce village qu’il avait caché le lièvre.

Forrest Fenn, Chouette d'Or, Max Valentin

Régis lance sa chasse au trésor !

Un jour, en début d'année 1993, Régis m'appelle pour me dire qu'il est parvenu à mettre sur pied une chasse au trésor avec 11 énigmes, chacune sur une double page : à gauche le texte de l’énigme, à droite une illustration réalisée par le peintre Michel Becker. Cette chasse, conçue dans l'esprit de « Masquerade », Régis l’a baptisée « Sur la trace de la chouette d'or » et l’a signée d’un pseudo : Max Valentin !

Quand il m’annonce son projet, je suis à la fois surpris par sa redoutable efficacité car c’est compliqué de monter une chasse au trésor, surtout quand il s’agit de la première mais aussi frustré car, entre-temps, j’avais essayé avec mon ami Michel Bagnaud, grand spécialiste des trésors de l’île des Cocos, de monter une version française de Masquerade : devant l’ampleur de la tâche, nous avons vite abdiqué. Pas Régis qui, dans la nuit du 23 au 24 avril 1993, est parti enterrer une chouette de bronze (réplique de celle à gagner) en un endroit que personne, à ce jour, n'a trouvé. Celui qui la déterrera n'aura plus ensuite qu'à l'échanger contre l'original en or et argent, rehaussé de 500 diamants, d'une valeur totale annoncée à 1 million de francs (qui passera à 150 000 euros à partir de 2001) !

Des points de similitude avec la chasse de la Chouette d’Or ?

La chasse au trésor de Forrest Fenn aux États-Unis me rappelle, par certains côtés, celle de Régis : ses énigmes sont cependant nettement plus créatives (et plus difficiles !) que celles de Fenn, car truffées de références culturelles, de pièges diaboliques et d'humour, agrémentées de dessins hauts en couleur réalisés par Michel Becker.

Comme pour Jack Stuef aux États-Unis, des rumeurs circulent depuis longtemps parmi les « chouetteurs » : la réplique en bronze de la chouette aurait été trouvée mais son inventeur refuserait de le dire, ou bien elle aurait été recouverte par la construction d’un bâtiment ou, pire, elle n’aurait jamais existé ! Le trouble des chercheurs s’est même accentué quand Michel Becker a tenté de mettre sa sculpture aux enchères, en juin 2014. Fort heureusement, un juge a interdit la vente de cette œuvre d’art car elle doit revenir, de plein droit, à celui qui exhumera la réplique en bronze ! Pour trouver, enfin, la solution à cette chasse, peut-être faudrait-il utiliser une approche similaire à celle de Jack Stuef, en s’intéressant à la personnalité et aux passions personnelles de Régis Hauser.

Une piste possible ?

Régis et moi, on était tous les deux originaires de Lorraine et passionnés par la recherche de trésors. C’est pourquoi, on a évoqué, à plusieurs reprises, l’histoire de deux personnages de notre région qui ont toute bercé notre enfance : « Saint Nicolas » et « Le Prince Noir ».

En Lorraine, pour tous les enfants, « Saint Nicolas », qu’on fête le 6 décembre, est plus important que le Père Noël du 25 décembre !

Quant au « Prince Noir », c'est le héros local ! En 1677, il s’empare du château de Dabo, érigé sur un énorme rocher dominant la ville. Ce château fut pris et brûlé deux ans plus tard sur ordre de Louis XIV. Arrêté et torturé, le Prince Noir ne révéla jamais où était caché son trésor, composé de diamants et d’argenterie. Au XIXe siècle, sur les ruines du château, fut construite la chapelle Saint-Léon. Aujourd’hui, autour du rocher, a poussé une épaisse forêt : Régis y aurait-il enterré, dans la nuit du 23 au 24 avril 1993, sa chouette en bronze... poursuivant là un rêve d’enfant ?

Forrest Fenn, Chouette d'Or, Max Valentin

 

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